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Vient de paraître
ALFRED
Je mourrai pas gibier


   

 

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ALFRED
Je mourrai pas gibier


 

Titre : JE MOURRAI PAS GIBIER
Scénario : ALFRED
Dessin : ALFRED
Couleurs : Henri MEUNIER
Editeur : Delcourt
Reliure : Cartonné
112 pages / (26 x 17 cm) / illustrations en couleur
Prix : 14.95 euros




RÉSUMÉ DE L’ÉPISODE :

Mortagne, c’est mille deux cent dix-neuf habitants. Mortagne, c’est du bois et de la vigne, les deux seules ressources qui alimentent les deux seules entreprises de la commune : Le Château Clément et la Scierie Listrac. Travailler pour Monsieur Clément revient à haïr ceux qui travaillent pour Monsieur Listrac, et inversement. La haine fouette les murs de Mortagne et c’est comme ça depuis toujours. Martial a préféré fuir ces querelles de clochers. Jusqu’à son geste sans retour...



Interview d’ALFRED :


Après Paroles sans papiers et Pourquoi j’ai tué Pierre, vous adaptez le roman éponyme de Guillaume Guéraud. Pourquoi ce livre-ci en particulier ?

Quand j’ai lu ce roman, je l’ai purement et simplement pris en pleine gueule. Ce texte court, sec, rêche vous accroche dès les premières phrases et ne vous lâche plus. J’étais ressorti complètement éreinté de sa lecture. Cette histoire, ce “fait-divers” tragique racontant un jeune ado qui, le jour du mariage de son frère, décroche une carabine et tire dans le tas m’avait complètement retourné. J’aime ces récits dont on sait, dès le début, que la fin sera tragique mais dont on ne peut se détacher tant qu’on ne saura pas comment ou pourquoi des êtres humains arrivent là. J’étais impressionné par la force et l’évidence de ce texte. Mais par-dessus tout, c’est le sentiment qui me restait en bouche, à la fin de la lecture, qui m’a le plus marqué. Il m’était à la fois impossible de cautionner l’acte de ce jeune ado, et en même temps, j’étais soulagé qu’il l’ait fait... C’est étrange comme sensation, déroutant.

Avez-vous rencontré l’auteur ?

Je connais Guillaume et nous sommes amis depuis quelques années. J’aime ses romans et son écriture sèche et directe. À la sortie de Je mourrai pas gibier, le roman avait fait polémique en étant publié par un éditeur “jeunesse”. Pas mal de gens n’avaient pas supporté cette histoire. En règle générale, Guillaume n’est pas quelqu’un qui laisse indifférent, avec son écriture et ses choix très tranchés. Toujours est-il que je me suis retrouvé avec ce texte en tête et l’impossibilité de l’en faire sortir. Il s’est mis à occuper de plus en plus de place et je n’ai pas pu faire autrement que d’en parler avec Guillaume, en lui demandant de me laisser l’adapter. Il était emballé par l’idée et a proposé de me laisser m’en débrouiller, pour voir où j’irais...

Pourquoi avoir voulu coller au plus près du roman ?

Simplement parce que ce livre est fort, violent et beau raconté ainsi et pas autrement. J’ai le sentiment qu’il n’y avait rien à ajouter, enlever ou changer. À sa lecture, j’ai tout de suite voulu l’adapter, dès le premier chapitre. Même si je ne savais pas encore comment, je sentais que j’avais besoin de me frotter à ce récit. Je lisais le texte et des images montaient, des sensations se précisaient. Guillaume venait d’écrire une histoire telle que j’aurais aimé l’écrire moi-même. Je n’avais aucune raison, du coup, de vouloir emmener le récit ailleurs. Pour moi, tout était là, posé, évident.

Pour quel traitement graphique avez-vous opté ?

De manière générale, j’essaye autant que possible d’adapter ma manière de travailler à l’histoire que je veux raconter. J’aime mettre en place des choses sur un livre et les bousculer complètement sur l’album suivant. Je veux être le plus proche possible des émotions que je peux avoir en découvrant moi-même l’histoire. Il m’était impossible d’aborder graphiquement Je mourrai pas gibier de la même manière que Pourquoi j’ai tué Pierre ou Le Désespoir du singe. Ces livres n’ont rien à voir les uns avec les autres. Pour ce titre-ci, je me suis concentré sur l’aspect très “linéaire” du récit. On suit cette histoire comme on lirait un fait-divers. J’ai donc opté pour une narration très sobre, sans grands effets de caméra ou je ne sais quoi. On est dans le Médoc, c’est une histoire ordinaire avec des gens ordinaires, dans un contexte ordinaire. Du coup, pas besoin d’en faire des tonnes. Cette histoire a UNE note, une seule note qui sonne de plus en plus fort à mesure qu’on avance dans l’histoire. Comme un bourdonnement dans l’oreille qui deviendrait de plus en plus gênant. Je voulais donc un outil me permettant un traitement graphique limité, comme pour me forcer à rester coincé dans ce village dont on ne part pas si facilement quand on y est né. Et je suis simplement parti avec un stylo bic et du mauvais papier.

En somme, il s’agit d’un coup de folie d’un adolescent, un geste comme on peut en lire tous les jours ?

J’ai l’impression que c’est le genre d’histoire dont on a tous entendu parler dans les journaux ou à la radio. Le simple fait-divers sordide du type qui dérape. On lit ça en trois lignes dans le journal et on passe à autre chose. Dans son roman, Guillaume s’arrête, remonte un peu le fil et propose simplement de raconter comment on en arrive à ça. Comment un être humain passe la barrière, craque, et “fait tout péter”. Il y a quelque chose d’affreusement humain dans tout ça. C’est un récit violent à tout point de vue. Sur ce qu’il raconte, sur ce qu’il fait ressentir, sur ce qu’il génère comme réflexions. Cela renvoie à soi et à ses propres limites, aussi. C’est sans doute ce qui avait dû déstabiliser pas mal de gens, au moment de la parution du roman.

Quelle a été la réaction de l’auteur Guillaume Guéraud lorsque vous lui avez montré vos pages pour la première fois ? Appréhendiez-vous son opinion ?

Quand j’ai commencé à travailler sur cette adaptation, Guillaume m’avait donné « carte blanche » pour aborder son texte comme je le sentais et m’a laissé m’approprier ses mots en me faisant confiance. C’est très agréable et j’ai pu me libérer l’esprit du « qu’en pensera-t-il », qui peut parfois bloquer plus qu’autre chose. Toutefois, je connais bien Guillaume et je savais qu’il ne mâcherait pas ses mots ni ne m’épargnerait. C’est donc avec de la curiosité mais une pointe d’appréhension que je lui ai fait lire les 30 ou 40 premières pages, d’un bloc. J’avais souhaité avancer un bon tiers de l’album avant de montrer quoi que ce soit... Le fait qu’il soit, au final, très enthousiaste et heureux de voir ses personnages prendre corps, et qu’il trouve un ton juste à mon interprétation m’a carrément rassuré et donné l’énergie de poursuivre. Un détail m’a amusé : devenant spectateur de sa propre histoire et la « découvrant » pour la première fois, il a pris certains passages en pleine figure, les trouvant très durs... C’est une situation étrange que de proposer à l’auteur d’une histoire des émotions de lecteur similaires à celles qu’il vous a lui-même évoquées.

Même graphique, votre adaptation reste violente, puisque proche du texte initial. Êtes-vous anxieux du ressenti de vos lecteurs ?

Non. Je suis soucieux de bien raconter cette histoire. Pas de ce qu’elle pourra provoquer. En règle générale, durant la réalisation d’un album, je ne souhaite pas penser au lecteur ou prendre en considération ce qu’il pourrait penser de mon travail. Je tâche de transmettre le mieux possible ce que j’ai à raconter et d’être au plus près de ce que je ressens moi-même en « vivant » cette histoire. Le reste ne m’importe pas. Après, une fois que l’album est là, j’aime en discuter et recevoir les impressions des gens qui souhaitent en parler. Pour moi c’est une autre étape de la vie du livre, et je l’apprécie beaucoup. Mais tant que je suis en train de le faire, ce livre n’appartient qu’à moi et aux auteurs avec qui je le partage. J’ai besoin de faire des livres très différents les uns des autres. Que les gens qui lisent mon travail ne se retrouvent pas dans chacun d’entre eux ne me dérange pas. Mon travail ne consiste pas à, forcément, proposer aux gens ce qu’ils attendent ou connaissent de moi.


 

 




 

 

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