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VERNISSAGE VENDREDI 18 JUIN 2010

El paño
L’art carcéral Chicano


EXPOSITION DU 19 JUIN AU 8 JUILLET 2010

Le mercredi 19 mai 2010





Vernissage vendredi 18 juin à partir de 19h
et lancement du n°2 de la revue HEY !
>>> www.heyheyhey.fr





Exposition organisée en partenariat avec la Pop Galerie


Par essence, la culture mexicaine célèbre son histoire à travers une imagerie populaire admise et comprise par tous. En prison aussi, où ses « locataires » utilisent la vérité du dessin qu’ils préfèrent aux mots chuchotés entre deux gardiens, dans le vacarme assourdissant des parloirs surpeuplés.

L’art du paño, diminutif de pañuelo (“mouchoir” en espagnol) est apparu pendant les années quarante dans les prisons du Texas, de Californie et du Nouveau-Mexique, à la faveur du Pachuco Movement (zootsuiters) qui cristallisa pour la première fois l’identité chicano aux États-Unis. Certains amateurs remontent jusqu’au système pénitentiaire français mis en place au Mexique après la révolution de 1910, quand seuls les prisonniers blancs pouvaient disposer de crayons et de papier pour écrire du courrier. Devant cette ségrégation financière, les détenus, hispaniques et illettrés pour la plupart, inventèrent leur propre façon de communiquer avec le dehors. Sur des mouchoirs réglementaires fournis gracieusement par l’administration pénitentiaire, ils se mirent à dessiner à la plume avec de l’encre récupérée, de la cire ou du café. D’impeccables substituts illustrés qui laissaient passer des messages aux proches, au-delà des murs d’enceinte.

Depuis, l’art du paño perdure, se transmet d’une génération de détenus à l’autre, véhiculant ses codes, son style, ses techniques. Sa réalisation minutieuse permet de tromper, le temps de son exécution, la soledad de l’enfermement. L’objet peut aussi servir de monnaie d’échange entre prisonniers, une commande fort appréciée pour cantiner le nécessaire à la survie carcérale.
Souvent condamnés à de lourdes peines, ces dessinateurs puisent leur inspiration dans la culture des gangs chicanos de Los Angeles. Un syncrétisme kitsch qui mixe les images pieuses de la religion catholique (visage du Christ, Vierge de Guadalupe patronne de Mexico, etc.) aux formes généreuses de la pin up latina, Minnie Mouse, Betty Boop, [...], aux chromos des calendriers mexicains, aux symboles mythologiques préhispaniques (temples mayas, aigle, soleil), évoquant les grosses cylindrées customisées (lowrider), mettant en scène guerriers aztèques et grandes figures de la révolution mexicaine (Pancho Villa, Emiliano Zapata).

Au même titre que les Murales (peintures murales), le paño appartient à la Chicano’s Pride qui explose à la fin des années soixante aux États-Unis. Il dépeint des êtres chers, des souvenirs personnels pré-détention, la Vida Loca dans le barrio (le clown gai) ou notifie l’affiliation à un gang (MM 13, Mexican Mafia). Il illustre la vie carcérale (le clown triste) par des référents symboliques intimement liés à l’expérience de l’enfermement (tirando tiempo) et s’empare des thèmes religieux chers à l’Église catholique (le péché, le pardon, le salut, la rédemption). Ces influences, mêlés à la technique de récupération d’encre des stylos Bic, voisinent avec celles, traditionnelles également, des tattoo flashes old school. Elles jumellent aussi parfois l’iconographie originale de la drug culture (omniprésente chez les gangmembers) : expression coulant d’une larme, volute de fumée psychédélique, champignon magique ou seringue hypodermique tachée de sang mais esperanto des paradis artificiels... On se souvient de la collection de Rudy Padilla, dont une partie fut exposée au Smithsonian American Art Museum en 1998. Et de sa judicieuse sortie : « The paño becomes the canvas of his soul expressing yesterday’s sorrow and tomorrow’s hope. » Quelle plus belle devise ?

Pour cette exposition organisée en collaboration avec la Pop Galerie, la Mauvaise Réputation présente une quarantaine de ces exceptionnels paños mexicains dont seulement une vingtaine seront mis à la vente.